- PATAGONS
- PATAGONSLe terme «Patagons» est employé dans la littérature ethnologique et dans les récits des voyageurs d’une façon assez confuse. Au sens strict, il concerne les indigènes de la Patagonie, cette région de l’Amérique australe qui s’étend des environs du 40e degré de latitude sud au détroit de Magellan.La Patagonie ainsi comprise ne présente aucune unité géographique ni culturelle. Le versant pacifique, constitué d’archipels montagneux, au climat marin, couvert de forêts, peuplé de pêcheurs, s’oppose par presque tous ses caractères au versant atlantique, aux reliefs peu accentués, au climat continental, à la végétation désertique ou semi-désertique, habité par des chasseurs. Entre les deux régions, les contacts sont pratiquement impossibles sauf par quelques cols dans le nord et, vers le sud, par la région du détroit de Magellan et des mers intérieures.Les habitants de cette Patagonie géographique, les pêcheurs de l’Ouest et les chasseurs de l’Est, constituent sur les plans anthropologiques et culturels des groupes absolument distincts. Il ne faut pas opposer les Patagons du continent aux Fuégiens de la Terre de Feu, mais les pêcheurs des archipels du versant pacifique (Patagonie et Terre de Feu) aux chasseurs des pampas du versant atlantique (Patagonie et Terre de Feu). Les premiers [cf. FUÉGIENS] comportent les anciens Chono, les Alakaluf et les Yaghan ou Yamana, les seconds les Tehuelche et les Ona.Le milieuDu río Negro au détroit de Magellan, le plateau de Patagonie s’étend entre la cordillère des Andes et l’Atlantique sur une longueur de 1 600 km. Au-delà du détroit, il se prolonge et s’effrite vers le sud sur toute la longueur de la Terre de Feu. Le relief de cet immense plateau est peu accidenté. Les hauteurs ne dépassent nulle part quelques centaines de mètres. Vers le sud, une chaîne volcanique marque, au nord du détroit de Magellan, la frontière entre le Chili et l’Argentine. De nombreux dépôts morainiques indiquent l’ancienne extension des glaciers quaternaires. Les fleuves sont peu importants. Le climat, continental, est caractérisé par des pluies peu abondantes et par des vents violents du sud ou de sud-ouest, soufflant surtout en été.La végétation est composée d’herbacées et de buissons. Très pauvre dans les provinces de Chubut et de Santa Cruz, elle devient plus verdoyante vers le sud et surtout en direction des Andes. Dans les régions de piémont, les arbres apparaissent d’abord en bosquets clairsemés puis forment des forêts de plus en plus denses sur le flan de la montagne, jusqu’à quelques centaines de mètres d’altitude.La faune terrestre est pauvre et comprend guanacos, renards, rongeurs, tatous, oiseaux divers dont des nandous (autruches américaines), des flamants et des oies sauvages. Dans les régions de bosquets, on rencontre aussi des huemuls et de rares pumas.Sur les côtes, vivent de nombreux oiseaux de mer (mouettes, pingouins, etc.) et des mammifères marins. Les côtes plates, aux abris rares, exposées aux tempêtes, sont peu favorables aux établissements de pêcheurs.Les chasseurs du continent: les TehuelcheSur le continent, les groupes qui nomadisaient entre le río Negro et le détroit de Magellan furent depuis le XVIIIe siècle désignés sous le nom de Tehuelche, dont on ignore l’étymologie. Les Tehuelche, ces Patagons dont la grande taille avait frappé l’imagination des premiers voyageurs européens, avaient une économie essentiellement fondée sur la chasse au guanaco et au nandou. Ils consommaient aussi des œufs, des racines, des tubercules, des baies, des graines, et ignoraient toute forme d’agriculture. Leurs campements étaient constitués soit de simples abris où passer la nuit, soit de huttes recouvertes de peaux de guanaco pour les installations de plus longue durée. Leurs armes comprenaient des arcs, des flèches et des bolas; leurs outils étaient faits de pierre taillée et d’os travaillé. Ils ignoraient le tissage et la poterie, et travaillaient avec habileté les peaux de guanaco et de nandou, utilisées pour la confection de vêtements, de couvertures de huttes, de lanières diverses. L’unité politique était la bande de quelques dizaines d’individus dirigés par un chef.Les Tehuelche paraissent avoir été plusieurs milliers d’individus aux XVIIe et XVIIIe siècles. En 1809-1810, une épidémie de petite vérole réduisit leur nombre de moitié. Depuis, leur disparition a été rapide. En 1913-1914, la réserve indienne de Santa Cruz ne comptait plus que trente hommes, quarante femmes et trente-deux enfants, dont beaucoup étaient métissés.Au début des années soixante-dix, il n’y avait déjà plus de groupes Tehuelche vivant la vie de chasseurs des grandes plaines. Quelques individus plus ou moins métissés travaillent comme péones dans les estancias de Patagonie.Les chasseurs de Terre de Feu: les OnaSur le versant atlantique de la grande île de Terre de Feu vivaient les Ona ou Selk’nam. Avec les Tehuelche, c’étaient les plus grands Indiens d’Amérique et leur taille atteignait 1,80 m de moyenne. Les Ona étaient essentiellement des chasseurs de guanaco. Leur alimentation de base carnée était complétée par des champignons, abondants, quelques racines, des algues, des baies, des œufs. Tandis que pendant les rudes hivers ils campaient sur les côtes plus tempérées, en été, ils partaient nomadiser et chasser vers l’intérieur. Ils avaient donc deux types d’habitat, l’abri provisoire constitué par une simple paroi contre le vent et la hutte conique plus permanente. L’arc et la flèche étaient les armes principales, l’outillage était fait de bois et d’os. Le cuir, l’os, le bois, la pierre servaient de matières premières de base. Les Ona vivaient en bande de quarante à cent individus. Au sud-est de la Terre de Feu vivait un groupe apparenté, les Ausch.Les Ona formaient un groupe d’environ deux mille individus à la fin du XIXe siècle. Il n’y avait plus que trois cents survivants en 1910 et une centaine vers 1925. Victimes à la fois des maladies européennes et d’une lutte sans merci entreprise par les nouveaux occupants des plaines de Terre de Feu, les Ona ont aujourd’hui complètement disparu. La dernière Ona ayant connu la vie traditionnelle, Lola, est morte en octobre 1967 à plus de quatre-vingts ans.On ne sait rien des Ausch dont il ne subsistait qu’une soixantaine d’individus en 1887 et qui se sont éteints ou se sont fondus avec les Ona avant qu’aucune étude n’ait été entreprise sur eux.
Encyclopédie Universelle. 2012.